La route Zérotracas
30 novembre 1999
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Les candidats à la Présidentielle et la sécurité routière.

Ça ne vous aura sans doute pas échappé : nous sommes en période électorale, après les présidentielles les législatives. Et, comme c’est l’usage, les candidats à la magistrature suprême ont fait assaut de propositions et d’engagements pour nous faire miroiter un monde meilleur. Très bien. Mais pour la sécurité sur la route, que comptaient-ils faire ? Nous retiendrons bien sûr plus particulièrement les engagements de Nicolas Sarkozy, le nouveau président.

L’insécurité routière était un des points clés du précédent quinquennat, matérialisé par la loi de 2003 sur la violence routière, le durcissement des contrôles, et l’arrivée des radars qui font s’envoler les points du permis. Malgré un début d’année 2007 meurtrier, le bilan est plutôt positif avec moins de 5000 tués en 2006. L’effort sera t-il poursuivi par le nouvel élu ?

Tout en s’appuyant sur leurs réponses, Zérotracas.com a mené sa propre enquête et fait le bilan des promesses.

Un peu d’histoire.

L’intervention publique en matière de sécurité routière est assez récente. Quasi rien jusqu’en 1972 où est créé un Comité Interministériel dédié (CISR). 16 500 personnes étaient mortes sur les routes cette année-là et appelaient les premières lois : ceinture, alcool, vitesse. Les mêmes thèmes qu’aujourd’hui.

Le cadre réglementaire se développe dans les décennies suivantes, y compris au niveau européen, et le nombre de victimes diminue. Une inversion de tendance au tournant du siècle (1998-2001) inspire au candidat Chirac un grand chantier sur la violence routière. Son gouvernement fera voter la loi du 12 juin 2003 qui multiplie les contrôles (1000 radars) durcit les sanctions (8 millions de points perdus en 2006) et modifie la formation (permis probatoire, BSR…). Les prétendants de 2007 étaient-ils prêts à poursuivre l’effort engagé ou à libérer l’automobiliste ? Tour d’horizon des programmes avec une certitude : il n’y aura pas d’amnistie.

L’amnistie : unanimité.

Aucune illusion à avoir : si vous avez des amendes à payer, envoyez vos dons. En 2002 déjà, La Prévention Routière avait demandé aux candidats d’alors de se positionner sur le sujet. Rebelote en 2007 et même réponse : les principaux prétendants à la magistrature suprême sont formellement opposés à toute forme d’amnistie des infractions au code de la route. Au mieux, certains petits candidats, comme Corinne Lepage, finalement ralliée à François Bayrou, promettent d’exonérer les amendes dues au stationnement impayé. Il se peut que, dans l’euphorie des premiers jours de pouvoir, l’heureux(se) élu(e) reprenne cette proposition, mais rien n’est moins sûr.

Du côté des extrêmes, qui n’ont de toute façon que peu de chances d’être concernés par la mise en œuvre de l’amnistie, pas de réponse précise. Au Front National, on s’insurge que les contrevenants étrangers soient dispensés de payer, alors que les bons Français sont pressurisés.

La vitesse et l’alcool, c’est dépassé.

Face à la baisse spectaculaire du nombre des victimes, chacun promet de poursuivre la lutte contre la violence routière, et particulièrement sur la vitesse. Les écologistes et les Verts sont les plus virulents, arguant du fait que la limitation de vitesse limite aussi la pollution. Dominique Voynet se réjouit « qu’on ne parle plus d’adapter la ville à la voiture » et appelle même à brider les véhicules à 130 km/h. Marie-George Buffet, candidate « de la Gauche Populaire et antilibérale » (ex-PC) plaide pour le développement des transports publics et du ferroutage pour « limiter le nombre de véhicules sur les routes ». Elle soutient la thèse du « bridage moteur » et veut plus de radars signalés en amont sur les routes. Sans être aussi radicaux, les autres candidats montrent leur détermination : François Bayrou pense que « les radars sont des outils efficaces  de prévention », insiste pour que l’argent des amendes soit consacré à la prévention et préconise aussi le développement des limitateurs de vitesse. Nicolas Sarkozy, « guidé par la culture du résultat », promet « des contrôles plus ciblés et plus nombreux » pour arriver à moins de 4000 morts en 2007. Ségolène Royal est tout aussi ferme sur la vitesse et insiste sur « le respect des distances de sécurité ». Elle défend l’idée d’une concertation avec les collectivités locales pour accentuer la répression « en zone urbaine lorsqu’on excède les limitations de 20 km/h » et veut « allonger la période d’interdiction de conduire pour ceux qui perdraient leur permis pour la seconde fois ».

Le consensus est le même sur l’alcool. Comme il est peu probable que les radars disparaissent de nos routes, il n’y a aucune chance de voir remonter le taux d’alcoolémie admis. Quant à la drogue au volant, aucun ne prône la tolérance.

Une éducation routière et citoyenne.

La Prévention Routière a demandé aux candidats s’ils étaient favorables à une heure mensuelle de formation à l’éducation routière de la maternelle à la terminale. Corinne Lepage adhère. Les autres candidats sont aussi déterminés, mais plus flous. Ancien prof, Bayrou s’engage à soutenir les interventions multiformes de la Prévention Routière dans les écoles, et souligne que « les auto-écoles, en complément de l’apprentissage de la conduite, sont aussi les lieux d’éducation à la sécurité routière ». Ce qui est déjà le cas. Royal et Sarkozy insistent tous deux sur le rôle de l’école en la matière. Pour le favori de l’UMP, il est essentiel de s’adresser prioritairement « aux jeunes conducteurs de deux roues », « de faciliter l’accès des jeunes au permis » en s’appuyant sur « l’éducation par les parents ». Pour la candidate socialiste, « le code de la route est un code citoyen ». Il doit sensibiliser « les jeunes dans leur approche de l’espace public pour qu’ils en deviennent des utilisateurs conscients et autonomes ».

Dominique Voynet va plus loin : « l’enseignement à la conduite routière à l’école doit s’intégrer dans une éducation à la citoyenneté, à la coopération, à la solidarité et responsabilité », indispensable à « leur vie en société ». Pour les Verts, il faut créer « un code de la rue » et « appeler un changement de culture sur la manière de se déplacer ».
Au PC, on rêve d’un permis gratuit, financé par les compagnies pétrolières et les assureurs, et complété par une « formation continue et un recyclage obligatoire tous les 10 ans ». Dénuée d’experts et craignant modestement d’être banale, Arlette Laguillier est « pour un enseignement de l’éducation routière pour les jeunes ». Le FN et les autres partis n’ont, à notre connaissance, aucun point de vue sur la question. 

Mais les candidats soutiennent l’idée d’une formation tout au long de la vie pour maîtriser tous les modes de transport et aucun n’évoque la disparition du permis à points.

Voitures et infrastructures.

Outre les limitateurs de vitesse en série évoqués plus haut par François Bayrou et soutenus par Nicolas Sarkozy, ainsi que le bridage des véhicules préconisé par Dominique Voynet et Marie-George Buffet, les candidats s’engagent à demander des efforts aux constructeurs pour améliorer la sécurité. Certains (Royal, Bayrou) pensent que les décisions doivent être prises au niveau européen et Sarkozy « souhaite que le produit des amendes soit affecté à des actions et des équipements de sécurité ». Effectivement, les équipements coûtent chers et nécessitent des aides. La leader socialiste promet de « soutenir la recherche publique dans ce secteur ». Elle constate que « la sécurité à l’intérieur de l’habitacle a beaucoup progressé et que la sécurité externe (collision avec un deux roues et un piéton) doit être mesurée et renforcée ».

Au nom de tous les motards, merci aux candidats qui – enfin – prennent en compte leurs revendications. Le candidat de l’UMP attend les propositions des Etats Généraux des deux roues, et met, tout comme Bayrou, « l’amélioration du réseau routier » au cœur du débat. Sa ralliée, Corinne Lepage, constate la dangerosité de certaines infrastructures pour les motards et élargit le débat : il faut aussi « engager des mesures spécifiques pour les handicapés ». Madame Buffet pense que ces infrastructures doivent avoir un rôle actif  pour « inciter les conducteurs à la prudence ».
Tous les grands candidats pensent d’ailleurs aux autres usagers vulnérables : piétons, cyclistes, enfants… Marie-George Buffet préconise même « un corps de gardiens de la paix dédié à la police de la route, notamment aux abords des écoles ». « L’espace public n’est pas réservé à la seule voiture » souligne Ségolène Royal. D’ailleurs, Dominique Voynet appelle à « généraliser les pistes cyclables isolées du flux, et pas seulement en ville ». Son projet : « faire que chacun puisse se déplacer sans se sentir en danger », notamment en « créant des passages mieux protégés et en réglementant plus strictement le stationnement ».

Il est certain que rendre les routes plus sûres et généraliser les équipements de sécurité sont de bonnes idées. À condition de mettre les progrès, à l’image de l’ABS, à la portée de tous.

Conclusion : votez sécurité routière.

Quel que soit le candidat élu, il (ou elle) ne remettra pas en cause les efforts engagés. Ainsi, les dernières mesures annoncées par Dominique de Villepin, toujours Premier Ministre à l’heure où nous écrivons, devraient être maintenues (2000 radars fin 2007 et lutte contre la conduite sans permis).

Dans les propositions de ses prétendants successeurs, on pourra regretter que les annonces soient très générales et peu chiffrées. Si, à la manière de Nicolas Hulot et de son pacte écologique, quelqu’un les avait un peu secoués, on aurait peut-être obtenu des projets plus concrets. Tant pis. Invitons-les à consulter, par exemple, les propositions des motards interrogés par Zérotracas.com sur RMC pour l’écriture du manifeste de la conduite des 2 roues pour inspirer des mesures précises. Quid, par exemple, des amendes proportionnelles aux revenus expérimentées en Suisse ou de la TVA à 5,5% sur les équipements de sécurité ?

Reconnaissons néanmoins à tous le soutien aux associations, un réel souci sur la formation et l’importance d’élargir celle du conducteur à celle du citoyen.

Et à propos de citoyenneté, n’oubliez pas d’aller voter.

Un grand merci à la Prévention Routière pour son étude et un petit blâme aux sites des candidats qui ne développent que chichement le programme sécurité routière.

 

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