Hormis l’exubérance de certains modèles et la débauche de moyens des grandes marques, la tendance globale du salon était à l’écologie et la déconsommation. Les nouveaux carburants, les voitures « vertes », les véhicules électriques ou solaires - parfois très novateurs - les berlines “low-cost“ et l’arrivée encore timide des constructeurs chinois ont marqué cette édition.
Côté sécurité, équipementiers et constructeurs truffent les voitures d’électronique et de capteurs pour corriger nos limites humaines… avec parfois des résultats mitigés. Quant à la prévention, si la base du travail reste l’information, la simulation, réelle ou virtuelle, fait son apparition.
En route.
Vos papiers ! Et oui, la prévention au Mondial, c’est d’abord du papier. Les institutionnels, les forces de l’ordre et les assureurs impriment une quantité phénoménale de dépliants, journaux et affiches qui, tous, disent à peu près la même chose. Ceinture, vitesse, alcool, drogue, apprentissage, portable, pneus, conduite des seniors : les grands items de la prévention sont déclinés à toutes les sauces. Et c’est une bonne chose. La cause est commune et l’on sait que seuls les messages rabâchés parviennent à avoir un impact sur les comportements.
Instigatrice de « Capitaine de soirée » (pour mémoire, c’est celui qui conduit et qui ne boit pas), la Prévention Routière décline sa campagne sur son stand : info sur l’alcool, distribution de bracelets fluos identifiants et, plus utile, d’éthylotests. Elle organise aussi des quizz sur le code, et de très bons tests d’acuité visuelle. Signalons leur journal bi-mensuel Circuler Autrement et un excellent dépliant sur « ce qui a changé dans le code de la route depuis 5 ans ».
Également présente au salon, la Caisse d’Assurance Maladie insiste sur les risques de la conduite dans le cadre du travail. Une bonne initiative.
La route simulée.
Lors de notre visite, nous avons conduit un bus, une moto, plusieurs voitures... et provoqué une demi-douzaine d’accidents ! Rien de grave, rassurez vous : nous étions sur des simulateurs de conduite, très nombreux au Mondial 2006.
Le stand de la Sécurité Routière proposait, en guise d’échauffement, de chausser d’étranges lunettes qui recréent la vision avec 1,5 gramme d’alcool dans le sang. Suivre un tracé au sol ou évaluer une distance devient alors très difficile.
Place ensuite au volant du simulateur de conduite, version civilisée des jeux vidéo de voitures, où le parcours défile sur un écran. Sauf que là, le but n’est pas de gagner mais d’éviter l’accident en freinant à temps. D’ailleurs, la machine mesure temps de réaction et distance de freinage : on voit ses limites. Surtout sur un autre stand, celui de la gendarmerie, équipé du même type de simulateur, où un sympathique pandore en uniforme incite les participants à appuyer sur le champignon ! Rien que ça, ça valait le déplacement, surtout au milieu des nouvelles jumelles radar exposées !
Sur ces simulateurs, on n’évite jamais l’accident. Et pour cause : la machine le déclenche dès qu’on est en faute. C’est au moment où l’on suit de trop près une voiture qu’elle perd sa remorque. Si l’on garde ses distances, la remorque reste en place ; mais tôt ou tard, on tombe dans un autre piège.
Michelin et son Bibendum interactif, avec qui on peut discuter, convient les visiteurs dans une autre voiture montée sur vérins, afin de simuler le roulage avec des pneus sous-gonflés. Edifiant et spectaculaire.
Signalons enfin les simulateurs développés par un assureur qui fait de la « mise-à-la-place-de-l’autre » l’un des axes majeurs de son action de prévention. Ainsi, on peut y conduire une moto ou un autobus, et prendre conscience de la perception de la route qu’ont ces usagers particuliers. Et on se dit que conduire un bus, c’est un exploit, même à Grenoble, ville très bien reconstituée par les images de synthèse du simulateur.
Seul bémol sur les simulateurs : ils tombent souvent en panne !
L’expérience physique.
Si les simulateurs permettent de tester ses automatismes et sa réactivité, d’autres équipements permettent d’éprouver physiquement l’accident.
De nombreux jeunes faisaient la queue devant les voitures-tonneaux : montée sur une remorque pour être promenée dans toute la France, une voiture est embrochée sur un axe dans le sens de sa longueur. On s’installe, on s’attache (important) et un technicien lance le manège : deux tours dans un sens, pause la tête en bas, et deux tours dans l’autre sens. Les jeunes crient comme à la foire du Trône, et ressortent de là, espérons-le, convaincus de l’utilité de la ceinture sans laquelle ils s’écraseraient contre le pavillon.
Pour ceux qui douteraient encore, rendez-vous au stand de la Préfecture de Police. Parmi les engins de contrôle anti-pollution atmosphérique et phonique, un rail de 5 mètres, sur lequel coulissent deux sièges placés en file indienne. Une fois assis et sanglés, les deux participants sont envoyés contre un butoir. Bing. Et retour pour éprouver le choc arrière. Rebing. Ça secoue. Imperturbable, l’agent informe : les chocs avant et arrière se font à 7 km/h seulement. D’accord ! À 50, ça doit faire très mal : une chute du quatrième étage disait une récente campagne de communication… Merci la ceinture.
L’électronique au service de la prévention.
Pour les constructeurs, la sécurité, active et passive, est un argument de vente. Les systèmes d’assistance et d’information, notamment développés par les stars Allemandes, sont impressionnants : régulateur de vitesse, parcage automatique, correcteur de trajectoire, affichage tête-haute, détecteur d’obstacle, système prédictif de précollision, vision de nuit… Le tableau de bord d’un Boeing.
La limite de toutes ces innovations, c’est de ne pas “débarquer“ le conducteur en trop le déresponsabilisant à force d’assistances. D’autant qu’il ne maîtrise pas forcément tous ces équipements parfois déstabilisateurs. Un exemple : paniqués par les claquements de l’ABS, des victimes d’accident ont relâché la pédale du milieu lors d’un freinage d’urgence ! D’ailleurs, les constructeurs évoquent l’hypothèse de former leurs clients au bon usage de leurs prouesses technologiques. Pas bête.
Parmi les nombreux nouveaux produits développés par les équipementiers, nous avons retenu une valve de pneumatique (K-Pressure de Pirelli) qui passe au rouge lorsque la pression est trop basse. Système intuitif très astucieux, mais coûteux (50 € les quatre, disponible en 2007).
Niveau prévention, un constructeur Suédois d’équipements de sécurité propose une ceinture sensible au comportement du conducteur. En cas de conduite dangereuse repérée par les capteurs, elle se tend par impulsions pour inviter le chauffard à se calmer. Là encore, on peut se demander si le système ne risque pas d'être perturbant… À suivre.
Les grands chantiers de la prévention.
Le salon est aussi l’occasion de rencontres et de table ronde. Notre ami Bernard Darniche en a profité pour réunir ses Citoyens de la Route, lors des états généraux de cette association.
Côté gouvernement et collectivités territoriales, l’action de prévention va s’organiser autour de 3 axes majeurs : la sensibilisation des jeunes conducteurs aux dangers de la route, la suppression des « points noirs » (80% des accidents surviennent sur 20% du réseau) et la vitesse en ville.
Ce dernier axe vise particulièrement à protéger les piétons, et surtout les plus jeunes et les plus âgés, victimes “privilégiées“ de l’accident urbain. En parallèle, les constructeurs travaillent sur l’amélioration des pare-chocs et capots afin de rendre le moins traumatisant possible le choc piéton. Si les pouvoirs publics et les entreprises privées vont dans la même direction, notre sécurité à tous risque d’aller dans le bon sens.
Conclusion : plus responsables.
Selon un sondage publié dans un nouveau magazine gratuit (Vmobile), 89% des Français sont sensibles à l’argument « sécurité » lors de l’achat de leur véhicule. Et la sécurité des passagers est la première préoccupation de 96% des conducteurs ! Avec des chiffres comme ça, on se dit que les comportements sont en train de changer. Comme quoi, rabâcher, ça marche.
Et avant de quitter le Mondial, chargé de 47 kilos de documentation, on s’est offert le plaisir d’aller visiter l’Incroyable Collection, une exposition de vieilles voitures prêtées par les plus grands musées. Il faut le reconnaître : les Facel Vega, les Bugatti, les Panhard et Levassor n’étaient pas très sûres, mais elles sont toujours magnifiques !